– Je me souviens de la première fois que j’étais venu au Maroc, c’était pour te rencontrer, hors cadre professionnel…
Steven Cornell lâcha la phrase, en reposant son thé glacé sur la table de jardin, alors que le parasol peine à contenir la chaleur du printemps dans le quartier des ambassades de Kigali. L’un des plus sécurisés du pays.
Face au journaliste, son ami, le Prince Ibrahim, homme d’affaires, intermédiaires depuis une vingtaine d’années maintenant. Un homme ayant construit des avions de combat pour le continent Africain. Un bâtisseur. Pourtant, ce dernier songeait en regardant au-delà de son gazon parfaitement coupé et qui commençait à jaunir.
-Le Maroc mise beaucoup sur le commerce Extérieur. Une feuille de route a été déposé jusqu’en 2027. J’ai lu le document, j’envisage de m’y réimplanté d’ailleurs. Le pays se développe, mais il y a aussi une raison à cela…
Steven enchaine.
-Tu as vu son ambition d’organisé un Grand Prix. Le casting est prestigieux et solide. Le budget de 1,2 milliards de dollars aussi d’ailleurs.
Prince Ibrahim ne réagit pas. Il continue de regarder au loin, ferme t’il les yeux derrière ses lunette de soleil ? mystère. Après un moment, il inspira lourdement.
-L’ambition est là, c’est sûr. Maintenant, le pays était en difficulté depuis longtemps et c’est les Emirat Arabe Unis, qui agissent comme la banque des pays arabes, qui ont injecté 12 milliards d’euros pour sauver le pays en début d’année. Cela ne se fait pas sans contreparties, c’est comme à la Banque Mondiale ou le FMI. Le Maroc souffre de problèmes agricole et hydro électrique et l’argent va aider à construire des infrastructures. Pourtant, ce qui est intéressant c’est que la veille de l’annonce avec les Emirats, dans un forum à Rabat, les présidents de fédération royale marocaine ont souligné que le sport allait être une opportunité de développement pour le pays.
-C’était quand ces annonces ? demande Steven
– En mai, le 22 ou 23 je crois.
-Et l’argent des Emirats, va servir à construire des infrastructures pour permettre au pays de développer ses ambitions dans le sport à l’horizon 2030 ?
Le Prince resta silencieux et prudent. Il n’y avait pas d’oiseaux en ce début de printemps à Kigali. La chaleur commençait à être trop intense. Au loin, une ambulance faisait rugir sa sirène. Un bruit courant dans la capitale.
-Il faut construire des Stades, aéroports, routes, hôtels, hébergements, des espaces de logistique. Cela représente des milliards. Casablanca, Marrakech, Fès et Agadir sont les 4 villes privilégiés.
-On parle de Tanger pour la F1… lâcha Steven Cornell étonné.
-Etonnant en effet, mais je ne pense pas que la priorité sera d’aller là-bas. Il serait plus logique de construire un complexe similaire à ce qu’a été réalisé à Miami autour du Hard Rock Café Stadium. Donc construire un circuit autour d’un stade. L’heure ne sera plus vraiment de construire une piste comme avant.
Steven Cornell songea un instant aux propos de son ami, homme d’affaires. Sur le fond il avait raison. Le projet Tanger avait été présenté, comme un avatar de Singapour, alors que la tendance est toute différente aujourd’hui en F1. Voir Mexico, voir Miami et même Madrid. Steven est interrompu dans ses pensées par le Prince qui continua son exposé.
-Le Mondial 2030 est important pour le Maroc, sur le plan économique cela stimulera l’économie du royaume. C’est un symbole et le pays compte dessus pour devenir moderne et entrée dans le XXI siècle. Mais je constate aussi que le sport sera l’un des deux piliers de soft power, l’autre sera son armée. Comme ici au Rwanda d’ailleurs. L’armée est un outil d’influence pour gagner en crédibilité à l’échelle internationale et bénéficiera aussi à l’économie. Tu sais, Steven, que le Rwanda est le premier fournisseur de casque bleue de l’ONU ? Personne ne le sait, et c’est un atout très apprécié dans les négociations.
Le sport et le militaire, comme deux outils pour sauver l’économie du Maroc à l’horizon 2030/2045. Mais la F1 dans tout cela ? estima Steven.
Prince Ibrahim se sentait soudainement résigné par la question.
-Tu sais, je ne pense pas qu’il y aura un Grand Prix sur le continent avant un bon moment. C’est trop compliqué, la nature, l’économie, la météo. C’est un rêve, même ici au Rwanda, et tu sais que j’ai soutenu ce projet de circuit il y a 2 ans maintenant, il ne fait plus partie des discussions. Liberty Media souhaite des projets de 10 ans minimum pour les circuits. Sinon pas de signature. C’est essentiel pour son business model, dans cette période d’instabilité ambiante ou l’avenir semble sombre.
Sombre…comme l’avenir d’une course de F1 en Afrique.
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Retrouvez les aventures du journaliste Steven Cornell dans les séries Cercle Concorde – Usurpation (dont l’histoire remonte à 2013) et Mimèsis (dont les histoires sont plus actuelle et concernant l’introduction de la 11ème équipe de F1 et l’affaire d’un Team Principal accusé d’harcellement).
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Les histoires de la saison 2 :