Lewis Hamilton annonçant qu’il avait hâte de se débarrasser de sa Mercedes W14 (comme la W13 de l’an dernier) et Toto Wolff dévoilant que la prochaine W15 aura un design différent. Avec quelques semaines d’écart, la rhétorique de la marque allemande est la même que celle de la Scuderia Ferrari, qui elle aussi, abandonne son concept pour se conformer à la tendance actuelle. Une situation que nous avons déjà vu par le passé.

1977, la menace fantôme

Retour en 1977, Team Lotus fait évoluer son modèle 78 qui remporte cette année là 5 victoires en championnat. A l’époque on parlait d’une transmission révolutionnaire, car la compréhension aérodynamique à l’époque était au début. Beaucoup d’équipes, à l’époque, n’étudiaient pas leur monoplace en soufflerie. En 1978, Lotus lance le modèle 79, mais hormis la Wolff WR5/6 et l’Arrows FA01 et Shadow DN09, les deux monoplaces de Tony Southgate (qui a fait partie de l’équipe technique de la Lotus 78), personne n’imite Lotus. Chacun décide de partir dans sa propre direction. McLaren et Ferrari font le choix de renforcer leur monoplace et développer l’aérodynamique supérieure, Brabham de revenir à son design de la BT44. C’est en 1979 que tout le monde reprend le concept Lotus.

Ferrari adapte avec sa T4 le concept difficilement, Brabham abandonne le V12 Alfa Romeo et le BT48, pour créer la BT49 a moteur V8 FOd Cosworth. Williams a tardé à lancer sa FW07 et Ligier n’a pas réussi à faire évoluer correctement sa JS11 propulsée par le V8 Ford, pourtant dominatrice en début de saison. McLaren sur cette période 1979/1980 va lancer 4 monoplaces différentes et Team Lotus ira trop loin avec son modèle 80.

L’attaque des clônes

Ainsi, entre 1977 et 1979, il y a eu une période d’adaptation pour chacun. A l’époque, personne ne savait de quoi il s’agissait concrètement. C’était l’époque des pionniers. Mais, beaucoup d’équipes, comme McLaren et Brabham par exemple, ont d’abord privilégié leur propre concept, avant de rentrer dans le rang.

La revanche des venturi

La situation est similaire aujourd’hui. Mercedes et Ferrari après deux saisons d’exploitations de conception, vont rentrer dans le rang Red Bull Racing, comme Team Lotus à l’époque. La Formule 1 étant un sport d’ingénieur, l’égo fait partie de l’équation. Lors d’un changement de réglementation, chacun souhaite avoir son avantage. Afin d’avoir de l’avance sur la concurrence. Il est très difficile de se convertir. Par exemple, la première véritable monoplace à effet de sol de la Scuderia Ferrari date de 1982. Celle de McLaren de 1980/1981. Longtemps après les autres.

Un nouvel espoir

Début 2006, Michael Schumacher après le premier essais de la F248, sur le circuit de Fiorano, est déçu. Panique dans la Scuderia. Ross Brawn et Jean Todt, insistent auprès de Luca di Montezemolo pour stopper « le projet de latinisation » de l’équipe, entrepris depuis fin 2004. Brawn rappelle Rory Bryne pour réviser la 248, concevoir la F2007 et mettre les bases de la F2008. Avec le résultat que l’on connait. Lors du changement de réglementation de 2022, il a été entendu que Bryne avait été rappelé par la Scuderia pour redevenir consultant sur la SF22 (pour valider le concept surtout). Mais, n’avait rien à voir avec la SF23. Il n’a pas participé aux plans d’évolutions des deux monoplaces. Une erreur probablement.

Lorsque Ross Brawn construit en 2011 son équipe de conception, composée de Bob Bell, Aldo Costa et Geoff Willis. L’idée était d’introduire du senior management dans la conception des futurs monoplaces. Le rappel de James Alisson en Mai 2023, pour relancer le bureau d’études de l’usine de Brackley est un signe. La monoplace 2024 sera la première de l’ingénieur anglais, depuis celle de 2020/2021. L’erreur de Toto Wolff est de ne pas vraiment avoir remplacé Aldo Costa dans l’organigramme, ni même continué à exploiter le modèle instaurer par Ross Brawn. Il l’a démonté pierre par pierre, pour une organisation s’inspirant plus de l’époque McLaren avec Ron Dennis et Adrian Newey ou John Barnard.

L’empire contre attaque

Si durant l’époque 1977/1980, il était compréhensible qu’il y ait eu des difficultés d’assimilations d’un concept révolutionnaire. La période 2022/2023/2024 n’a pas vraiment d’excuses. Elle a l’expérience du passée. Pourtant la séquence actuelle démontre que les aérodynamiciens et ingénieurs, découvrent, comme leur aïeux ont cherché comprendre la monoplace de Colin Chapman, celle de Red Bull d’Adrian Newey. Un domaine ou la Formule 1 n’a finalement pas vraiment évolué. Pourtant Aston Martin et McLaren ont mis les égos de côté pour progresser. Démontrant que dans la gestion humaine, c’est une dynamique essentielle et encore un domaine de progrès dans le paddock.

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